LES COMMUNICATIONS ENTRE VIVANTS ET ESPRITS

LES COMMUNICATIONS ENTRE VIVANTS ET ESPRITS

 

       Il semble bien que cette histoire commence avec celle des hommes, et qu'elle touche toutes les cultures. Le chamanisme est probablement la première forme de communication répertoriée, avec les esprits de la nature, les animaux, les ancêtres. Parallèlement, d'autres formes d'échange se développèrent : il y eut les oracles de l'antiquité et les prophètes, qui dialoguèrent avec les Dieux, et de multiples formes de divination profane, comme les prédictions de Nostradamus. Très longtemps, ces communications furent fréquentes, mais éparses et sporadiques. De nos jours, elles sont infiniment plus nombreuses, et l'histoire des contacts avec l'au-delà se raconte désormais en vagues successives, des vagues qui à chaque fois, font le tour du monde, et touchent des foules de plus en plus importantes. Voici, pour l'époque moderne, l'histoire de ces vagues, telle que décrite au livre 2 :

            « La première vague se forme après le choc causé par la publication en 1778, par le médium autrichien Anton Mesmer, de son fameux Mémoire sur la découverte du magnétisme animal. Cette appellation crée la confusion: en réalité, l'expression "magnétisme animal" désigne des phénomènes paranormaux exclusivement humains. Mais les lecteurs ne s'y trompent pas; ils se passionnent pour ce qui est décrit, et se mettent à expérimenter en nombre. Ils découvrent alors ce qu'ils baptisent le «somnambulisme magnétique», puis la « lucidité », un phénomène paranormal incluant télépathie, voyance et précognition. Le débat autour de la lucidité occupe toute la première moitié du dix-neuvième siècle. D'un côté, les savants officiels, tenants du matérialisme académique : pour eux, la lucidité est idéologiquement irrecevable. De l'autre, les spirites, pour qui elle est le résultat de communications avec des consciences désincarnées. Entre les deux, les magnétiseurs, qui constatent le phénomène, et l'étudient avec passion ; parmi eux, en France, le marquis de Puységur (1751–1825) :

« Puységur inaugure ainsi une vaste exploration des capacités de la conscience avec des magnétiseurs passionnés. Ensemble, ils élaboreront de multiples techniques psychothérapeutiques et façonneront les premières descriptions des mécanismes inconscients. De leurs recherches naîtront notamment l'hypnose, la psychanalyse et de nombreux courants psychothérapeutiques. » (1)

 

Notons au passage qu'il ne s'agit « que » de magnétiseurs ; pourtant leurs travaux sont à l'origine de percées scientifiques dans les domaines maintenant reconnus de l'hypnose, la psychanalyse, la psychothérapie. Á ces travailleurs de l'ombre, la science officielle refuse le statut de chercheur. Elle ne leur accorde qu'un statut dévalorisé de magnétiseur, mais elle utilise leurs travaux pour nourrir sa réflexion. Cet exemple montre que la  frontière est loin d'être nette entre la science officielle, et la science qu'on peut qualifier de marginale, celle du savoir en formation.

 

            Si la première vague peut être appelée celle du magnétisme animal, la deuxième est celle du spiritisme, initiée en 1848 aux États-Unis. Le spiritisme existait déjà, mais le phénomène de « coups de l'au-delà » révélé cette année-là par les sœurs Fox, déclenche un engouement extraordinaire pour les phénomènes spirites, d'abord aux États-Unis, puis en Europe à partir de 1850. On apprend à faire tourner les tables, et à obtenir d'elles des réponses sensées. L'afflux des témoignages est tel qu'en France, l'Académie des Sciences est saisie de la question le 21 mars 1853. Les expérimentations seront innombrables, par des personnalités de tous bords, y compris des scientifiques de renom travaillant isolément, ou en équipe au sein de laboratoires constitués. Le débat fera rage pendant 150 ans, et se poursuit encore de nos jours, car la seule explication trouvée, par le contact avec des esprits de l'au-delà, n'est pas admise par les scientifiques. Il y eut cependant quelques exceptions:

« Le biologiste Rémy Chauvin se pencha lui aussi sur la question, notamment à la suite des recherches effectuées dans les années 1960 par les Anglais Kenneth Batcheldor et Colin Brookes-Smith... » Il conclut à la réalité du phénomène, et… « Il ajoute en outre que « la technique est très ancienne puisqu'on aurait retrouvé sur les briques gravées babyloniennes un traité des tables tournantes dont on se servait alors pour interroger les dieux ». » (2)

Les ouvrages d'Allan Kardec, le théoricien du spiritisme, ne tiennent pas compte de ces expérimentations et débats, qui lui sont largement postérieurs. Ils ne prennent pas en compte non plus les vagues qui ont suivi :

 

  • la vague de l'écriture automatique : le phénomène était connu d'Allan Kardec, qui le cite sous le nom de psychographie, mais il ne prend son essor qu'au début du 20e siècle. La vague est alors très puissante, et se poursuit de nos jours. Elle nous apporte de nombreux textes dont beaucoup sont de grande qualité. Nous avons cité quelques auteurs français (Pierre Monnier, Roland de Jouvenel, Paqui, Belline, Albert Pauchard, Jeanne Morranier...), mais il y a aussi une foule d'étrangers : dans le monde anglo-saxon (Alice Mortley, Marie-Louise Morton, Arthur Conan Doyle, Rosemary Brown, Owen G. Vale, Neale Donald Walsch...), en Allemagne (Eva Herrmann, Gerda Johst), en Italie (Maria Valtorta), en Hongrie (Gitta Mallasz), etc...

 

  • la vague de la transcommunication instrumentale : les premiers enregistrements datent de la fin des années quarante, mais à l'époque, ils sont trop étranges et trop disparates pour être considérés. La vague décolle en 1959, avec les recherches d'un Suédois, Friedrich Jürgenson, puis celles de Constantin Raudive, un Letton vivant en Suède, à partir de 1964. L'un et l'autre publient leurs résultats, et font de nombreux adeptes, qui tous expérimentent de leur côté. La vague parcourt le monde germanique, touche l'Italie, l'Angleterre, les États-Unis. Des colloques s'organisent, des associations de recherches se créent ; on s'intéresse à d'autres moyens de communication : le téléphone, la télévision, la photographie… La France reste longtemps à l'écart, avant de suivre le mouvement à partir des années quatre-vingt-dix.

 

  • la vague des EMI (expériences de mort imminente). Le phénomène ne date pas d'aujourd'hui : François Brune cite une étude de 1987 consacrée à des EFM dont certaines remontent au Moyen Âge. Il cite également un chercheur italien, Ernesto Bozzano, qui, en 1923, y consacre une centaine de pages de son ouvrage intitulé Phénomènes psychiques au moment de la mort. Mais la vague ne prend son essor qu'en 1975, avec la publication aux États-Unis d'abord, puis partout dans le monde de l'ouvrage célèbre du Docteur Raymond Moody, Life after death. Après quoi elle se déchaîne : les témoignages deviennent innombrables, en provenance du monde entier. Des médecins, psychologues, auteurs et chercheurs de tous bords s'emparent de la question, et publient une multitude d'ouvrages et d'articles scientifiques. De nos jours, la vague déferle encore…

 

  • la vague du channeling (3). Edgar Cayce, dans les années vingt, faisait déjà du channeling, alors que le terme n'existait pas encore. Avec une nuance toutefois : l'entité qui l'inspirait ne s'est jamais identifiée, alors que chez les channels modernes, l'identité du correspondant de l'au-delà est presque toujours connue.

La saga du channeling est superbement racontée par le journaliste français Erick Pigani dans son livre Channels - Les voix de l'au-delà, dont la première édition date de 1989 ; les deux citations qui suivent en sont tirées. Elle commence, assez discrètement, dans les années soixante :

Aux États-Unis, Jane Roberts, communique pendant plusieurs années, à partir de 1963, avec Seth, une entité décédée en 1942 qui avoue avoir vécu à Elmira sous le nom de Frank Withers. On retrouvera sa trace à la mairie du lieu. À partir de 1968, Jane Roberts commence à publier ce que l'on appellera Les livres de Seth, qui se vendront à des millions d'exemplaires.

« L'enseignement de ce channel est à la fois très fin, très riche et très profond. Il concerne principalement les problèmes de l'âme, de la psychologie, de la sexualité, de la réincarnation, et surtout ceux de la nature de la réalité. » (4)

C'est aussi aux États-Unis que commence en 1965, une dictée extraordinaire, qui va durer sept ans. La personne qui tape les textes à la machine est William Thetford, patron du département de psychologie du Colombia University College of Physicians and Surgeons, à New York. La médium qui les reçoit est Helen Schucman, une collaboratrice professeur de faculté en psychologie clinique à la réputation irréprochable. Les textes, transmis sans ponctuation ni tête de chapitre, sont mis en forme par le Docteur Kenneth Wapnik, un psychologue clinicien. L'ouvrage, de 1200 pages, s'intitule A course in miracles (Un cours sur les miracles) ; l'auteur dit être Jésus, ce qui est un vrai choc pour Helen Schucman, athée militante.

« Le cours montre pas à pas, d'une manière didactique, comment atteindre la paix intérieure et la joie sereine en toute circonstance, et ce en adoptant une nouvelle façon de regarder le monde : ce changement de perception est un « miracle », d'où le titre de l'ouvrage… Bien que cet enseignement soit dicté par Jésus, avec plus de 700 citations de la Bible, il interprète différemment bien des références que tout le monde connaît. De même qu'il emploie de nombreux termes chrétiens, mais en leur attribuant un autre sens que celui qui est communément admis. … il ne prétend pas être la seule et unique voie d'évolution personnelle. Le Jésus qui parle - et peu importe si cela est « vrai » ou non, car là n'est pas le problème - précise que ce Cours est un chemin spirituel parmi des milliers d'autres, tout aussi utiles. Exactement le contraire de ce qu'affirment bien d'autres « chefs spirituels ». Et je ne parle pas ici que des channels… » (5)

La vague s'amorce ainsi, à partir des années soixante, par ces deux manifestations tout à fait extraordinaires, et quelques autres d'une qualité comparable, comme l'épisode des jardins de Findhorn en Écosse. Peu à peu, les médias américains s'en emparent. La vague devient un tsunami en novembre 1986, quand l'actrice Shirley Mac Lane montre à la télévision une scène autobiographique et authentique de channeling. L'événement, particulièrement frappant, est vu par 28 millions de téléspectateurs, qui, le lendemain, s'arrachent chez les libraires son dernier livre, L'amour foudre. La vague submerge le pays. Les channels se multiplient, qui donnent des consultations à tout va… Une exploitation commerciale se met en place, le meilleur côtoie le pire ; on entend des prédictions extravagantes, plus tard démenties par les faits. Ces dérives ont souvent pour origine l'avidité des channels, mais pas toujours. Eric Pigani raconte en détail le cas de Ramtha, une entité canalisée par J.Z.Knight, une jeune fille au charisme flamboyant. Les débuts sont prometteurs, avec un livre intitulé Ramtha, qui laisse voir une belle philosophie. Les affaires de Miss Knight sont florissantes, mais le travail de Ramtha se dégrade ; il en vient à professer un catastrophisme délirant, qui égare ses adeptes, au point que l'auteur s'interroge: « Ramtha a-t-il été remplacé par une entité démoniaque ? »

 

            Observons que soixante-dix années s'écoulent entre la première vague, celle du magnétisme animal, et la deuxième, celle du spiritisme ; puis cinquante ans environ entre celle-ci et la suivante, celle de l'écriture automatique. Par contre, à partir de 1950, les trois vagues suivantes se forment à de courts intervalles, dix à quinze ans ; elles se chevauchent presque.

            Il y a manifestement, à l'époque contemporaine, une accélération de l'Histoire ; de la part du monde spirituel, une urgence à communiquer et se faire connaître, qui n'existait pas auparavant. Ce n'est certainement pas un hasard : observons qu'à la même époque, le rythme des évolutions scientifiques et technologiques s'accélère lui aussi notablement, dans notre monde. C'est un indice de plus en faveur de l'idée que les deux mondes  - spirituel et matériel - évoluent en parallèle, en s'influençant l'un l'autre. Jusqu'à présent, ils paraissaient étrangers l'un à l'autre, séparés par une frontière étanche et imperméable, au point que beaucoup d'entre nous niaient l'existence du monde spirituel.

En prenant du recul, nous découvrons peu à peu qu'en fait, ils coexistent : même si l'un des deux nous est en grande partie invisible, nous constatons que la frontière qui semble les séparer est en réalité un simple rideau de papier, qu'une foule d'intervenants franchit chaque jour, dans les deux sens. »

 

            L'histoire qui précède montre à quel point les communications entre le monde des esprits et le nôtre sont nombreuses et diverses. Face à ce corpus de faits si imposant, si répétitif, si significatif, comment la science officielle peut-elle s'obstiner à nier ? Comment peut-elle refuser de prendre ces faits en compte ?  Le devoir de la science n'est-il pas de s'incliner devant les faits, de les considérer tels qu'ils sont, même s'ils sont dérangeants ?

Ce rejet obstiné, qu'elle oppose depuis plus de deux siècles à des faits de plus en plus insistants, a quelque chose de déraisonnable. La science sur laquelle nous avons bâti est devenue impérialiste, fermée, dogmatique. Il est temps de réagir...

 

Notes :

  • (1) Miriam Gablier, Quand la lucidité entre en scène, dans Inexploré hors série N°7, Nov 2018, p.130
  • (2) Jocelin Morisson, Les tables tournantes, ibid, p.135
  • (3) Le channeling est un terme d'origine américaine qui désigne une communication répétitive entre un humain et une entité de l'au-delà.
  • (4) Erik Pigani, Channels, les voix de l'au-delà, 2003, Presses du Châtelet, p.129
  • (5) ibid, p.136-137

 

                    

 

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