CONSCIENCE LOCALE… NON LOCALE… OU QUANTIQUE ?
Un très bon ami, le DR A. M. qui a fait avec brio la relecture de mon tome 2 avant publication, me soumet pour commentaire quelques pages de l’ouvrage bien connu La physique quantique pour les nuls. Un paragraphe a attiré son attention :
« Un certain nombre de scientifiques, spécialistes du cerveau ou physiciens, font l’hypothèse que notre cerveau serait un outil quantique de traitement de l’information (comme un ordinateur quantique), et que le phénomène de conscience pourrait être lié à des processus quantiques. »
Cette hypothèse est un minimum !
Il est évident que le fonctionnement cérébral et la formation de la conscience reposent sur des phénomènes électromagnétiques subtils, des microcourants électriques à l’échelle atomique et moléculaire. La physique quantique est LA seule science capable de décrire ces phénomènes de manière crédible. Bien sûr, ses descriptions sont souvent absconses, difficiles à comprendre, contre-intuitives et peu convaincantes. Mais on n’a pas mieux ! Et surtout, la physique quantique obtient des résultats brillants ; ses principes et ses déductions sont confirmés par un grand nombre de faits… Vouloir s’en passer est dérisoire, comme si l’on cherchait à marcher sans utiliser ses jambes.
Pour moi, il est absurde de rejeter l’implication de la physique quantique dans le fonctionnement du cerveau et la formation de la conscience. D’ailleurs plus personne ne le fait. Le débat a fait rage pendant tout le 20e siècle. D’un côté, les pionniers comme Edwin Schrodinger, Niels Bohr, Max Delbruck… Pour eux, il était clair que la physique quantique était très présente dans le monde du vivant, qu’elle y jouait un rôle majeur. De l’autre, une foule de chercheurs qui réclamaient des preuves, et pensaient qu’elle n’était pas applicable en biologie, à cause des problèmes de décohérence.
Les preuves sont venues avec le temps. Depuis les années 2000, la liste des phénomènes biologiques que l’on n’explique qu’avec l’aide de la physique quantique s’est considérablement allongée : la photosynthèse, la sensibilité rétinienne, la bioluminescence, l’olfaction, la synthèse de la vitamine D, la magnétoréception… Le vent a tourné ; de nos jours, même les plus conservateurs évitent d’écrire négativement sur le sujet, de peur de se décrédibiliser.
Malgré les avancées, très peu de scientifiques ont compris que notre cerveau est un système de traitement de l’information. Les auteurs du livre emploient le conditionnel ; ils écrivent que « un certain nombre de scientifiques font l’hypothèse que notre cerveau serait un outil (quantique) de traitement de l’information… »
Or ce n’est pas une hypothèse, c’est un fait. On le sait depuis que l’on a commencé dans les années 1940 à utiliser l’analyse cybernétique pour tenter de comprendre le fonctionnement du cerveau. Les premiers modèles du fonctionnement neuronal établis par MacCulloch et Pitts ont montré comment les réseaux de neurones interconnectés exécutaient des instructions logiques de base, comme les fonctions « ET », « OU » et « NON ». Á l’époque, les chercheurs utilisaient ces mêmes instructions logiques pour faire fonctionner les premières machines de traitement de l’information, que l’on appelle maintenant ordinateurs.
Depuis ces travaux qui datent d’il y a presque 80 ans, nous savons donc que notre cerveau fonctionne comme un ordinateur, mais on n’en a pas encore tiré toutes les conséquences. Lorsqu’on le fait, la vision devient beaucoup plus large, et des questions inattendues se posent. Voici la première :
Notre cerveau fonctionne-t-il comme un ordinateur classique, un ordinateur quantique, ou bien un mix des deux ?
En effet, nous avons développé deux systèmes différents de traitement de l’information :
Les ordinateurs classiques :
Leur langage est binaire ; ils manipulent des 0 et des 1. Le stockage de l’information se fait sur des bits, des systèmes physiques qui ne peuvent prendre que 2 états. Exemple : un atome stable a deux électrons en couche périphérique (état 0). On le soumet à une impulsion électromagnétique, il perd un électron ; il devient un atome excité stable (état 1). Pour retourner à l’état 0, il suffit d’envoyer une nouvelle impulsion. Les états intermédiaires entre 0 et 1 sont impossibles.
Le domaine des OC est celui de l’électronique classique, qui exclut les effets quantiques.
Les ordinateurs quantiques :
Leur langage n’est pas binaire ; ils manipulent des 0, des 1, et des valeurs intermédiaires. Le stockage de l’information se fait sur des qubits. Certains qubits sont limités à quelques valeurs intermédiaires ; d’autres acceptent une infinité de valeurs. Les ordinateurs quantiques, sur un grand nombre de problèmes, sont beaucoup plus performants que les ordinateurs classiques. C’est le cas avec la mémoire : on a calculé qu’avec 300 qubits, on pourrait stocker 1090 informations binaires, soit plus que le nombre d’atomes dans l’univers observable. 300 qubits équivalent à 300 atomes ; ils seraient évidemment invisibles à l’œil nu. Réaliser la même performance avec un OC conduirait à une mémoire de taille monstrueuse.
Mais OC et OQ n’ont pas le même langage. Celui des OC est exclusivement binaire. Celui des OQ ne l’est pas ; il peut traiter des grandeurs non numérisées, qui varient de manière continue (en analogique), et surtout il exploite des effets quantiques qui n’existent pas en physique classique : l’effet tunnel, la possibilité pour une particule de se trouver simultanément dans une superposition de plusieurs états différents, les interférences quantiques, l’intrication…
Lorsqu’il s’agit de traitement de l’information, le physique et le quantique sont deux mondes différents, qui n’obéissent pas à la même logique.
Le domaine des OQ est celui de la physique quantique : il n’exclut pas l’électronique classique, mais va bien au-delà.
Il est tout à fait possible de faire travailler ensemble un ordinateur classique et un ordinateur quantique. C’est même indispensable : les OQ que nous avons conçu ne peuvent fonctionner sans l’aide d’OC.
L’OC communique bien avec le monde physique : il gère parfaitement les capteurs qui permettent de prendre connaissance du problème posé, et les actionneurs, qui permettent d’agir. Mais il ne travaille qu’en binaire ; les entrées doivent être numérisées.
L’OQ peut travailler avec des entrées analogiques non numérisées, mais il ne peut ni communiquer directement avec le monde physique, ni agir sans intermédiaire.
Les deux dispositifs sont complémentaires, mais la communication entre eux doit être gérée. Un signal électromagnétique acceptable par un OC n’est en général pas acceptable par un OQ, et l’inverse est vrai aussi. Un dispositif d’interface est nécessaire, que l’on peut appeler encodeur / décodeur, ou convertisseur de signal.
Au vu de ces données, il est légitime de s’interroger : certes, le cerveau fonctionne très probablement comme un système de traitement de l’information, mais sur quel mode ? Classique, ou quantique, ou un mix des deux ? La réponse est loin d’être évidente.
Il y a une deuxième question, encore plus problématique que la première :
Le fonctionnement en l’absence de cerveau
La science actuelle considère que l’intelligence, la mémoire et la conscience sont produites par le cerveau ; cela paraît évident lorsqu’on évoque la question de manière superficielle. Mais l’évidence disparaît aussitôt que l’on réfléchit, car il y a une foule de situations où ces trois facultés se manifestent bien que le cerveau soit absent ou inopérant. En voici quelques-unes, qui ont été dûment constatées par la science :
1. Les observations au scanner
Les observations au scanner du neurologiste anglais John Lorber (1915-1996) sur une centaine de patients hydrocéphales, publiées en 1980 dans la revue Science Magazine sous le titre « Is your brain really necessary ? » (le cerveau est-il vraiment nécessaire ?). Environ soixante avaient une boite crânienne pleine de liquide à plus de 95%. Certains étaient des handicapés mentaux profonds mais d’autres se montraient plus ou moins normaux, quelques-uns ayant même un QI nettement supérieur à 100.
Un jeune homme ayant un QI de 126, diplômé en mathématiques de l’université de Sheffield, n’avait « pratiquement pas de cerveau ». La surface interne de son crâne était recouverte d’une fine couche de cellules cérébrales d’environ un millimètre d’épaisseur, et tout le reste était rempli de liquide. Son activité mentale et sa mémoire fonctionnaient à peu près normalement ; son niveau d’intelligence était largement supérieur à la moyenne, qui se situe à 100. Pourtant il n’avait pas de cortex, la partie du cerveau où semble se dérouler l’activité mentale pour les personnes dites normales.
2. Le phénomène des personnalités multiples
Le phénomène des personnalités multiples, que les psychiatres connaissent bien : le syndrome est décrit en détail dans le DSM 5, le dernier manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux publié par l’Association Américaine de Psychiatrie, et dans son équivalent européen le CIM.
Rappelons qu’il s’agit d’individus chez qui se manifestent non pas une personnalité unique comme c’est le cas pour la plupart d’entre nous, mais plusieurs personnalités différentes qui occupent la conscience en succession. Chacune d’entre elles a son identité, une famille d’origine, des souvenirs propres, des connaissances particulières, sa façon unique de marcher et s’exprimer, ses travers, ses goûts, ses habitudes…
La présence de ces personnalités multiples est une énigme que la science actuelle n’a jamais résolue. Mais pour ceux qui n’ont pas d’a priori contre la survie de l’âme, l’explication est simple : l’activité mentale en cours chez ces patients – conscience, intelligence, mémoire – est imposée par un objet extérieur : la psyché de l’hôte de passage, l’âme d’un défunt qui peut changer à tout moment. Dans cette situation, le cerveau du sujet ne crée pas l’activité mentale, il la subit.
3. Les souvenirs de vies antérieures, et les marques de naissance inexplicables par la génétique
On constate que certains enfants portent des marques de naissance et expriment des souvenirs qui les relient sans aucun doute possible à des défunts identifiés ne faisant pas partie de leurs ancêtres. La survie de l’âme et la réincarnation sont la seule explication plausible à ces phénomènes, qui ne peuvent plus être contestés après 60 années de recherche documentée, par des sources multiples dans le monde.
Là aussi, comme précédemment, c’est un défunt qui s’exprime : il modèle le corps de l’enfant en lui imposant des marques de naissance ; il modèle aussi son comportement en lui imposant ses souvenirs et sa personnalité. Ce cas est très proche de ceux décrits au paragraphe précédent. Chez les personnalités multiples, l’hôte de passage impose temporairement son activité mentale. Il se passe la même chose chez les enfants ayant des souvenirs de vie antérieure, mais l’hôte s’installe définitivement ; il devient résident permanent.
Dans les deux cas, le cerveau du sujet ne crée pas l’activité mentale ; il subit celle qui lui est imposée par une entité extérieure : la psyché d’une personne décédée qui, elle, n’a plus de cerveau.
Tous ces éléments prouvent qu’il n’est pas justifié de considérer le cerveau comme la seule source possible d’intelligence, mémoire et conscience. Envisager une autre source est tout à fait légitime ; c’est même un devoir si l’on souhaite être rigoureux, et tenir compte de tous les faits disponibles.
D’autres faits vont dans le même sens que les trois cas ci-dessus. Je pense bien sûr aux expériences de voyage hors du corps, aux manifestations des défunts par la médiumnité, la transcommunication instrumentale, le spiritisme, les expériences de mort imminente, l’écriture automatique, le poltergeist… Mais ces faits-là n’ont pas le même statut que les précédents.
En effet, les études sur le cerveau des hydrocéphales, les personnalités multiples et les souvenirs de vies antérieures ont été effectuées par des scientifiques reconnus, dans un passé récent. Des articles détaillés ont été rédigés, soumis à des comités de lecture, et publiés dans des revues scientifiques de qualité. Dans le cas des personnalités multiples, le savoir acquis est exploité par les psychiatres dans leur pratique courante. Rejeter tout ce travail issu de professionnels sérieux n’est pas une option raisonnable.
C’est moins le cas pour les autres phénomènes cités. Ils sont connus depuis longtemps, et ont suscité beaucoup d’intérêt au moment de leur découverte. Ils ont été abondamment étudiés, souvent par des chercheurs prestigieux. Mais les recherches et la publication des résultats n’ont pas été faites dans les règles de la science moderne, et la communauté scientifique actuelle n’est pas prête à les incorporer dans sa réflexion.
Il faudra pourtant le faire, car tous ces faits sont cohérents, et ils convergent vers une évidence commune : il faut envisager sérieusement la possibilité que nos activités mentales essentielles – conscience, intelligence et mémoire - soient issues d’une autre source que le cerveau.
Il est clair que lorsqu’on engage la réflexion dans cette voie, il faut trouver pour le fonctionnement humain un autre modèle que celui du cerveau omniprésent et tout-puissant qui prévaut actuellement en science.
Je ne suis pas le premier à mettre ce modèle en doute :
« N’est-il pas temps d’élargir notre vision ? C’est ce que propose le paradigme postmatérialiste, un courant scientifique émergent représenté par des personnalités comme le biologiste Rupert Sheldrake ou le chercheur en neurosciences Mario Beauregard, qui invite à dépasser l’idée que la conscience serait une production du cerveau. La commission Galileo, composée de 90 scientifiques de renom affiliés à une trentaine d’universités, plaide pour la reconnaissance de l’existence d’une conscience non locale. » (1)
La voie que j’explore n’est pas celle de la conscience non locale, une solution qui me paraît bien capillo-tractée. Dans mon tome 2, Théorie de l’âme quantique, je fais une proposition différente et inédite : l’existence d’une âme matérielle composée d’une petite quantité de matière dispersée, comparable à un essaim d’abeilles, fonctionnant sur le mode quantique. Je montre que cette solution est plausible, conforme aux faits et à la science moderne, et qu’elle fournit une explication crédible aux phénomènes inexpliqués qui rendent caduque l’idée de la conscience locale produite par le cerveau.
L’esprit humain y est étudié comme un système de traitement de l’information, produisant deux formes d’intelligence qui coexistent tout au long de la vie : l’intelligence quantique, qui opère avec un processeur et des programmes importés avec l’âme, lorsque celle-ci rejoint l’embryon peu de temps après la conception, et l’intelligence biologique, née et localisée dans le cerveau, programmée par l’éducation, la famille, l’environnement, l’expérience acquise.
Les trois situations décrites ci-dessus suggèrent que l’intelligence biologique créée par le cerveau pourrait bien ne pas exister. En effet, dans ces trois cas, l’activité mentale est présente en totalité - conscience, intelligence et mémoire – mais elle n’est créée par aucun cerveau : ni celui du sujet, ni celui de l’entité extérieure lorsqu’il y en a une.
Cela pose beaucoup de questions :
Peut-on généraliser, et conclure que notre activité mentale a toujours pour origine un objet qui n’est pas le cerveau ?
Quel est cet objet ?
Comment fonctionne-t-il ?
Si notre cerveau ne produit pas l’activité mentale, à quoi sert-il ?
Sur quel mode le système de traitement de l’information qui produit notre activité mentale - cerveau ou objet extérieur – fonctionne-t-il ? Classique, quantique, ou un mix des deux ?
Malgré les travaux de MacCulloch et Pitts, certains imaginent un troisième mode de fonctionnement, ni électronique, ni quantique, qui serait propre à l’esprit humain. Est-ce crédible ?
Ces questions n’ont pas été évoquées dans le tome 2 ; je vais le faire dans le tome 3. Bien sûr, dans cette étude, l’objet extérieur qui produirait notre activité mentale sera l’âme quantique, telle que décrite au tome 2. Les interactions âme-cerveau seront décrites en détail, avec l’aide d’un outil qui n’a jamais été utilisé à cette fin : la cybernétique.
Rappelons sa définition : il s’agit de la science qui étudie les mécanismes de communication et de contrôle dans les machines et chez les êtres vivants. Elle a la capacité précieuse de produire des schémas de fonctionnement très expressifs, qui permettent de synthétiser et rendre visuellement accessibles des ensembles complexes, impliquant un grand nombre d’interactions. Elle est donc parfaitement adaptée à notre problème.
De tels schémas seront proposés pour au moins trois cas :
• L’âme quantique au contact d’un cerveau fonctionnant sur le mode classique (électronique). Ce serait le cas d’un être humain vivant.
• L’âme quantique isolée (l’être humain mort).
• Le cerveau isolé, assurant seul le fonctionnement normal de l’esprit humain, tel que l’imagine la science actuelle.
Cette nouvelle approche, par son côté visuel et concret, devrait faciliter les discussions à venir. Le débat entre conscience locale, non locale, et quantique, ne fait que commencer.
Etienne Sabatier, janvier 2025.
(1) Pryska Ducoeurjoly, Enquête sur les guérisons inexpliquées, dans Alternatif bien-être N°219, 2024, p.12